dimanche 7 novembre 2010

L'Archaïque et les journalistes


Mon côté archaïque étant établi par mon précédent texte, je vais continuer à le revendiquer en me penchant sur une catégorie hors-sol, coupée du monde qu'elle est sensée connaître et présenter, j'ai nommé les journalistes.

Je croyais naïvement (j'ai aussi un côté naïf prononcé) qu'un journaliste était un fin observateur de la vie telle qu'elle se déroulait et un rapporteur fidèle de de ses soubresauts, de ses côtés sombres et lumineux. Je pensais qu'un journaliste était un témoin impartial, ou engagé lorsqu'il le revendiquait mais qu'en aucun cas il ne lui prendrait l'envie de se poser en juge et en donneur de leçons pré-mâchées et convenues...

Force est de constater que je fus vraiment naïf...

De nos jours, les seuls moments où les journalistes dans leur immense majorité (je tiens à préciser qu'il existe une minorité qui fait honneur à leur profession) se rebellent c'est lorsque quelqu'un ose, offense suprême !, s'en prendre à l'un d'entre eux... Dans ces moments là on sent cet esprit de corps qui ferait presque plaisir à voir si en plus ils se penchaient sur l'origine de l'attaque...

Mélenchon insulte Pujadas dans un reportage qui, s'il n'avait pas été repris en boucle par les médias, serait passé relativement inaperçu : Populisme indécent ! Honte insupportable ! Il est vrai que nous sommes tous conscient des qualités journalistiques de Monsieur Pujadas, de sa façon mordante d'interviewer les puissants et son respect mâtiné de servilité d'interroger les faibles... Ou l'inverse ? Je ne sais plus, je ne le regarde plus.

Non, il vaut mieux faire des gorges chaudes sur l'atteinte à l'intégrité proclamée de l'élite médiatique que de s'interroger sur le fait que nous pensons tous à peu près la même chose et que nous les tenons pour ce qu'ils sont : des garants de la « modernité » qui ne profite qu'aux mêmes et qui nous révulse, nous les archaïques...

J'ai même assisté au même type de réactions de journalistes sportifs contre Puel qui avait osé insulté après une conférence de presse un journaliste qui passe son temps à longueur d'articles à descendre son équipe et ses joueurs... Shocking ! La liberté d'expression des journalistes est sacrée ! Pas touche ! Il insulte qui il veut d'abord ! Et manquerait plus qu'en plus il y ait rébellion de la cible...

Tout cela ne serait que corporatisme et défense des acquis (ces mêmes corporatismes et défense des acquis que nos chers journalistes fustigent chez les autres à longueur de colonnes) et serait juste décevant de leur part si ne s'y mêlait d'autres considérations plus inquiétantes et frustrantes pour l'archaïque que je suis.

Si je résume un peu ce que l'on entend à longueur d'éditos, de reportages, d'articles, nous sommes un peuple réactionnaire, râleur, archaïque, fainéant, arc-bouté sur des privilèges exorbitants à l'heure de la mondialisation heureuse qui est synonyme de perte de qualité de vie pour nous mais qui rend tellement les Indiens, les Chinois et les Brésiliens si contents de leur sort (enfin ceux qui en profitent effectivement et qui sont loin d'être la majorité).

Il nous faut nous rendre à l'évidence et admettre que notre vieux pays doit se soumettre. Que nous devons accepter que nos enfants aient un avenir incertain et surement moins rémunérateur que le notre qui commence déjà à pâlir en regard de celui de nos parents. Mais surtout nous devons (oui la notion de « devoir » est fortement célébrée ces dernières décennies, moins celle de « droit » bizarrement) continuer à consommer et faire comme si de rien n'était. Après tout ce qui nous préoccupe, les médias le savent bien mieux que nous, est de savoir si nous pourrons partir en vacances, si nous pourrons le faire avec notre voiture dûment ravitaillée en carburant et je suppose que les premiers reportages sur Noël et ce que nous sommes supposé dépenser en moyenne en cadeau ne vont pas tarder à tomber...

Nous sommes donc, un peuple réactionnaire, râleur, archaïque, fainéant, arc-bouté sur des privilèges exorbitants, matérialiste, égoïste (avec quelle délectation on nous montre les matins de grève des français « moyens » énervés parce qu'il sont gênés ces nantis de grévistes. Bon en ce moment je trouve que les médias ont plus de mal à trouver des victimes qui ne soient pas compréhensives des mouvements sociaux), et totalement incapable d'appréhender des concepts un peu compliqués. Il faut donc nous les pré-digérer, les réduire à des concepts simplistes avec d'un côté le bien et de l'autre le mal... Et on nous demande ensuite de choisir...

Nous détestons l'étranger, l'autre, celui qui risque de nous piquer nos femmes, notre boulot pour lequel nous sommes trop payé par rapport à l'ouvrier Chinois et nous ne voulons pas que le monde bouge.

Vous vous reconnaissez dans ce tableau ? Non ? C'est pourtant celui que l'on vous dépeint chaque jour, quel que soit le média de masse employé...

Dorénavant les Américains font plus confiance aux informations circulant sur le net que celles fournies par les médias traditionnelles. A quand ce même phénomène en France ? Bientôt peut-être. Ce qui a le don d'énerver la médiacratie (quel autre nom lui donner ?) qui accuse internet de populisme (je vous conseille de lire ce que Jean-François Kahn dit à propos de l'origine de cette accusation de populisme) et de démagogie.

Amis journalistes (pure figure de style, les quelques amis journalistes que j'ai me confortent dans la respectabilité de ce métier lorsqu'il est exercé avec éthique), ne voyez-vous pas que pour reprendre un terme devenu célèbre il y a une fracture sociale ? Entre d'un côté les élites dont vous faites partie pour la grande majorité d'entre vous et de l'autre ce peuple que vous vous vantez de connaître mais que vous méprisez en ne faisant pas l'effort de le comprendre.

Comment pouvez-vous asséner qu'il faut réformer la France quand cela ne veut dire que régression sociale et abaissement de la qualité de vie, ce que nous savons tous ? Ce mot de réforme est une escroquerie que vous contribuez à propager. Vous acceptez même un recul de la démocratie quand vous laissez le pouvoir espionner les vôtres ou déplacer des juges trop indépendants mais du moment que cela ne salit pas votre réputation et ne vous importune pas personnellement pourquoi aller jusqu'à protester ?

Comment pouvez-vous avoir l'outrecuidance de nous insulter lorsque nous rejetons un traité que vous avez présenté comme obligatoire et ne pas réagir lorsqu'on bafoue notre choix en l'imposant d'une autre façon ?

Comment pouvez-vous brocarder le régime russe et laisser un procureur français impliqué dans une affaire d'état impliquant le chef d'état décider s'il donnera suite ou non aux enquêtes diligentées sans exercer ce fameux 4ème pouvoir pour l'obliger à ce qui s'appelle de la justice et de la décence ?

Comment pouvez-vous répercuter sans même les commenter les déclarations du gouvernement ? Sans les analyser ou les infirmer s'il y a lieu ? N'enseigne-t-on plus la notion d'interview dans les écoles de journalisme ? Je parle de ce style d'intervieweur qui pose des questions pertinentes et contredit lorsque des énormités sont assénées par les homme politique ou les simples détenteur de l'orthodoxie moderne.

Comment voulez-vous que nous vous écoutions ? Que nous vous comprenions ? Que nous vous respections ?

Le respect se gagne par ses actes et ses paroles. On respecte celui qui est debout. Pas celui qui se couche. Et celui devant qui on se couche ne nous respecte pas plus, au contraire...

Nous ne sommes ni des demeurés, ni des simplets. Nous comprenons les enjeux et les situations, même si cela implique de prendre son temps pour les assimiler. Nous avons besoin d'espoir et de rêves. C'est le devoir des politiques de les inventer mais c'est aussi le votre de en tant que miroir auto-proclamé des Français de nous les répercuter dans leur ensemble... sans les tronquer ou les annihiler parce que vous ne les acceptez pas.

Respectez-nous et nous ferons de même.... Peut-être même finirons nous par vous aimer de nouveau ?

mardi 19 octobre 2010

Je suis archaïque (et j'en suis plutôt fier en fait)


Ce texte a demandé un peu de maturation, ou de macération pour être exact, avant de finir sa vie à l'intérieur de mon inconscient et entamer son voyage de ma tête à la votre en passant de mes doigts à vos yeux. Par contre l'affirmation qui forme le titre est claire en moi depuis pas mal de temps déjà : je suis archaïque.

Non, je ne suis pas un tenant du « c'était mieux avant » et un anti-modernité. Je ne me languis pas des feuilles de velin et des stylo-encre (la plume j'ai pas connu) pour exprimer mes pensées. Je n'ai pas la nostalgie des années 80 et j'affirme que musicalement ça a continué à innover et progresser depuis la New-Wave (si !).

Non, je suis archaïque si je me réfère à ce qui est tenu pour la modernité et est asséné à longueur de temps dans les médias. C'est bien simple, nous n'avons plus la Droite et la Gauche avec un peu de Centre perdu au milieu, nous avons maintenant les (roulements de tambour) « tenants de la modernité » et les (huées du public chauffé à blanc) les « archaïques » forcément réactionnaires...

Je n'aime pas le clivage et ceux qui les imposent. Je n'aime pas les « prêt-à-penser », les propos convenus ni les directives venues d 'en haut.

Mais puisque l'on nous impose de choisir son camp, je le fais donc : je suis archaïque. Et en plus je le revendique !

Je suis archaïque parce que j'estime que l'état a un rôle à jouer dans ma vie.

Je ne suis pas pour des baisses systématiques d'impôts si cela conduit à ce que l'état n'assume plus le rôle qui lui est dévolu, comme celui de me protéger, de me permettre de me soigner, de m'assurer une retraite qui ne soit pas une aumône. Mais je n'accepte pas la dilapidation de ce que nous lui donnons pour que seuls des privilégiés soient servis, les mêmes qui conspuent l'état providence lorsqu'il s'agit de redistribuer aux plus faibles.

Je suis archaïque quand je pense que l'État doit nous garantir un système de santé efficace et public qui permette à chacun de se soigner sans que l'on doive choisir entre guérir ou manger ou payer son loyer. Je suis archaïque quand je refuse la privatisation de nos soins sous couvert d'une efficacité qui n'a jamais été démontrée dans aucun pays l'ayant mis en place (bien au contraire).

Je suis contre les « modernes » en pensant que la retraite par capitalisation telle qu'on veut nous l'imposer, en laissant notre système par répartition se déliter, n'est pas la solution. Les retraités américains sont assez de mon avis depuis un certain mois de septembre 2008 qui les a vu ruinés, à la rue et sans retraite pour cause de faillites bancaires. Et c'est cela qu'on essaie de nous revendre comme si rien n'était arrivé. Parce que les « modernes » n'ont pas le temps de faire des bilans, de tirer des conséquences, de se remettre en cause. Ils avancent.... Et nous reculons...

Je suis un archaïque en enrageant de voir que l'école de la République n'est plus synonyme d'ascenseur social et que l'on continue à la dégrader année après année notamment en estimant que le social n'a pas sa place dans l'enseignement. L'une des seules possibilités de grimper dans l'échelle sociale était le travail scolaire. Nous assistons au retour des classes inamovibles et imperméables, facilité par la disparition de cette classe poreuse qui permettait l'ascension ou qui freinait la chute : la classe moyenne. Cette classe moyenne dont l'apparition dans un pays émergent est le signe du dynamisme dudit pays. Alors inversement, que dire d'un pays dont la classe moyenne tend à disparaître ? Un « moderne » peut-il me répondre ?

Je suis un archaïque en voulant que l'état assume son rôle d'assistance auprès des défavorisés et qu'il cesse de se voiler la face en déléguant aux associations un rôle qu'il a abandonné. Coluche a créé les Restos du Cœur et chaque jour qui passe les bénévoles continuent son œuvre mais il avait créé cela de façon provisoire. Cela fait déjà 20 ans ! Une génération... Et si au moins l'État compensait son manque d'action par un soutien financier réel et efficaces de ces associations...

Je suis archaïque en pensant que la finance doit être vraiment régulée et contrôlée. Qu'il faut interdire à des gamins d'une vingtaine d'années de jouer avec la vie des autres. Puisqu'ils ne comprennent pas que spéculer sur les matières premières comme le blé ou le riz, pour gagner une somme qu'ils n'auront jamais assez d'une vie pour dépenser, conduit à la famine ceux pour qui ce blé ou ce riz fait la différence entre la vie et la mort et qu'ils ne peuvent plus se payer. Parce qu'ils détruisent des entreprises et des vies en pariant sur des hausses virtuelles d'actions en terme de secondes (et même maintenant de nanosecondes). Parce qu'ils ne créent rien et ne servent à rien à part enrichir les mêmes profiteurs de ce système qu'on nous vend comme l'alpha et l'oméga.

Parce que je veux revenir à un système économique où l'homme n'est pas une variable d'ajustement, ou plutôt la seule variable d'ajustement, pour dégager des profits qui ne seront pas réinjectés dans l'économie réelle mais qui permettront (je cite le chanteur Saez) « qu'un putain d'actionnaire nage avec les dauphins » .

Là les modernes m'accuseront de vouloir revenir au capitalisme d'après-guerre, ultime ringardise à leurs yeux... Je ferai juste la remarque que leur credo néolibéral est exactement le même qui avait cours au XIXe siècle et jusqu'en... 1929... Quelle belle modernité que voilà... Back to the nineteen... century.

Je suis archaïque enfin quand je rejette cet individualisme forcené qu'on a élevé en modèle depuis 30 ans. Je n'ai pas envie de ne penser qu'à moi, ma réussite, mon métier, ma famille, mes envies et mes plaisirs. Quelle petite vie que celle-là ! Quelle peau étriquée qui m'étoufferait à force de vouloir me contenir !

Je refuse cette idée que penser à son prochain est inutile, que l'égoïsme gouverne le monde et le cœur des hommes. Homo Sapiens et Homo Neanderthalensis ont su se hisser au dessus de la condition de bêtes. On ne va pas leur faire le déshonneur de retomber...

Je pense d'ailleurs que je ne suis pas le seul archaïque si j'en juge par certains détails comme le succès d'un film comme « Des hommes et des dieux » ou les nombreux bénévoles qui donnent de leur temps sans compter pour aider les autres.

Pour toutes ces raisons je clame mon archaïsme si cela marque mon opposition et mon rejet de cette modernité qui n'est que régression humaine et indifférence à l'autre et aux valeurs que l'on m'a inculqué et que je défends.

Archaïques de tous bords avec moi pour affirmer votre rejet de ce que l'on nous propose et non pas tenter mais bel et bien créer une alternative !

dimanche 25 avril 2010

L'avortement est un droit. Encore faut-il pouvoir l'exercer...


Le texte de Sylvain a, comme c'était prévisible, déclenché énormément de commentaires. Je ne veux pas le commenter. Il a le mérite de rappeler que la question du droit à l'avortement reste encore et toujours un sujet sensible et quasi tabou. Je dirai juste que tant que l'avortement ne devient pas un palliatif à la contraception c'est un droit inaliénable d'une société moderne où la femme est véritablement l'égale de l'homme.

Mais justement, en 2010, soit 35 ans après la loi Weil, ce droit d'avorter est-il pleinement applicable ?

Mais bien entendu me répondra-t-on. C'est facile et sécurisé et toute femme qui le souhaite peut avorter si elle en ressent le besoin. Vraiment ? Pas sûr. En fait je suis même certain du contraire. Nous assistons à une régression d'autant plus insupportable qu'elle est tenue loin de nos regards.

En 2010 des femmes recommencent à partir avorter à l'étranger parce qu'elles ont dépassé la date limite fixée par la loi Française. Pas parce qu'elles se sont décidées en retard : simplement de moins en moins de médecins acceptent de pratiquer cette intervention pourtant légale. Par objection de conscience pour certains. Parce que l'IVG est tarifée trop bas pour d'autres.

La politique du gouvernement actuel amplifie dramatiquement la situation avec la réforme Bachelot : la logique comptable qui a régit ces décisions de regroupement d'établissements hospitaliers a eu comme premières victimes les Centres d'Intervention Volontaire de Grossesse (CIVG). Déjà 3 fermés rien qu'à Paris, 2 autres sont en sursis. Combien en province dans le silence de nos médias nationaux ? Rien qu'un serait déjà dramatique. Là nous tombons dans l'insupportable.

Impossibilité matérielle pour les femmes d'exercer sereinement leur droit à avorter. Cela compliqué par la solitude morale dans laquelle ces femmes se débattent généralement lorsqu'elles décident de ne pas aller au terme de leur grossesse. Combien ont le support de leur famille ou du père putatif ? Combien assument leur choix au grand jour ? Bien peu. C'est encore considéré comme un acte honteux pour beaucoup trop de Français. Et cela d'autant plus que c'est la femme qui est montrée du doigt. Jamais l'homme. Alors que l'on sait bien depuis la fin de la fable de la cigogne que la procréation est une affaire d'équipe seule la partie féminine est jugée coupable. Mais c'est un grand classique des sociétés dirigées par les hommes. Malheureusement.

Il nous faut absolument remettre le droit à l'avortement sur le devant de la scène. Pour changer ou plutôt faire évoluer enfin les mentalités. Pour faire cesser aussi ces attaques incessantes contre l'IVG au nom d'une rentabilité économique fallacieuse ou au nom d'une conception morale rétrograde. Cette même conception morale qui ailleurs, dans des pays pas si lointains et évolués socialement, lutte pied à pied contre l'accès libre à l'IVG ou contre l'éducation des jeunes à la sexualité et l'accès libre à la contraception.

jeudi 11 mars 2010

Un peu de décence messieurs les banquiers !


Décence : (nom féminin) Respect des convenances, bienséance, pudeur. Synonyme : savoir-vivre.

Ce petit rappel n'est à mes yeux pas inutile. Aujourd'hui se croisent dans les journaux écrits (oui parce que dans les journaux télévisés, y compris sur les chaines d'information, on préfère gloser à l'infini sur le passage au niveau supérieur d'une compétition sportive d'une équipe de millionnaires adulée par des smicards) quelques informations qui m'interpellent : d'une part la situation catastrophique des Caisses d'Allocations Familiale qui sont au bord de la rupture devant l'afflux des demandes d'aides dues à la Crise, d'une autre on apprend que la France a perdu en 2009 322.000 emplois salariés dus encore une fois pour une très grande part à la Crise. Et dans le même temps on apprend que les quatre principaux groupe bancaires français vont verser 2 milliards de bonus à leur 7500 traders. 2 milliards... c'est une somme qui ne rentre pas sur ma calculatrice... si l'on se contente d'une simple division on obtient pour chacun de ses merveilleux représentants de l'espèce humaine et modèles d'altruisme la somme de 266.666 euros... soit 22.222 euros par mois. Il me semble que le salaire moyen tourne autour de 1.500 euros à titre de comparaison. Et il ne s'agit que d'une prime. Et bien entendu les très gros traders, ceux qui ont le plus joué à la loterie avec l'argent des autres auront la plus grosse part. Ça leur permettra d'être à l'abri pour leur troisième vie. Oui parce qu'il leur faudra au moins trois vies pour dépenser ce qu'ils accumulent...

Résumons-nous : les responsables de la crise se partagent des sommes indécentes gagnées sur notamment la spéculation des dettes des états qui leur ont sauvé la mise pendant que les acteurs de la vie économique réelle sombrent de plus en plus nombreux dans la précarité. J'oubliais ! On nous annonce aussi le même jour le retour des super-riches, ces millionnaires qui ont perdu énormément d'argent au début de la Crise (versez une petite larme, braves gens !) et qui, on respire, on retrouvé le chemin de la super-richesse.

Alors je m'interroge. Ne nous avait-on pas parlé de régulation de l'économie ? De refondation du capitalisme ? De plus jamais ça ? Il y a une éternité, il est vrai : un an imaginez ! Mais quand le magazine Forbes écrit que « "L'économie mondiale se remet, les marchés financiers sont de retour, particulièrement les marchés émergents" pourquoi changer une équipe qui ne perd jamais ? Pourquoi vouloir faire en sorte que les agences de notation soient véritablement indépendantes et peut-être efficaces et visionnaires ? Pourquoi vouloir que les banques cessent de financer les hedge Funds qui détruisent les entreprises plutôt que d'aider ces mêmes entreprises à se développer dans le cadre d'un rythme normal ? Pourquoi vouloir que cessent ces créations de produits financiers opaques, véritables martingales qui hier intégraient les hypothèques des logements des familles américaines moyennes et inférieurs et qui maintenant sont pleines des dettes des états. Pourquoi vouloir lutter contre l'émergence d'une nouvelle bulle financière ? Après tout, maintenant ils savent, ces gentils banquiers, qu'ils ne risquent rien. Les états le leur ont prouvé.

La seule chose qui leur a été demandé, mis à part des promesses qui n'engagent que ceux qui les croient, était de garder un profil bas en ces temps où la grande majorité souffre. Mais visiblement c'était encore trop.

Puisque l'on ne peut pas compter sur leur sens des responsabilité ni leur décence, il serait peut-être temps que les politiques s'en chargent non ? Utopie me diront certains. Obligation répondrais-je. Et question de vie ou de mort de notre société.

mardi 16 février 2010

Le gouvernement a-t-il peur de la jeunesse ?

En ces jours où le scandale des gardes à vues inutiles et imposées pour des raison de chiffres et de statistiques (plus un commissariat effectue de gardes à vue et plus il est susceptible d'obtenir des crédits de fonctionnement), où chaque jour apporte son affaire de brutalités policières, je vais parler de ce qui nous est arrivé à mon fils et moi-même.
Il y a environ 2 semaines, un dimanche vers 11h30, nous avons emprunté le métro pour nous rendre chez des amis. La station de métro était Alésia, dans le 14e arrondissement qui ne peut être taxée de station à risque.
Au moment de passer le portillon, j'ai été séparé 30 secondes de mon fils. C'est à ce moment là que je les ai vu : une dizaine de policiers vêtus de leur treillis bleu qui les fait se confondre avec des vigiles de sécurité. Mon fils a 17 ans passé et il n'a rien dans l'allure qui peut le faire passer pour un délinquant.
Quand je les ai vu, j'ai su qu'ils allaient l'arrêter. Un jeune tout seul, c'est limite de la provocation... Cela n'a pas raté. Ils n'avaient pas prévu que je leur tomberai dessus, dix secondes plus tard, furieux et essayant de me rester calme. Je savais que si nous avions passé la barrière ensemble, jamais ils ne nous auraient arrêté.
Mais ce ne fut pas le cas et j'ai donc exigé d'être contrôlé au même titre que mon fils. Le policier en face de moi a essayé de garder son naturel et m'a fait découvrir ce que jamais je n'avais eu à subir en plus de 42 ans de vie, une palpation de sécurité avec sac à terre et vidage des poches. Il a bien contrôlé que je n'avais pas d'arme dans la bourse qui contient mes pièces de monnaie mais a malheureusement oublié de vérifier ce que j'avais dans mon sac. Apprentis terroristes, pensez au sac à dos ! Nous avons eu droit ensuite au contrôle de la pièce d'identité, compliqué par le fait que leur talkie-walkie ne fonctionnait pas et qu'ils durent utiliser un portable personnel...
la raison de ce contrôle ? Officiellement une demande du préfet à la suite d'une recrudescence des phénomènes de bandes organisées... ils ont du croire que mon fils était une bande à lui tout seul...
Je suis perplexe également sur le lieu choisi ainsi que de la date et l'heure... à 11h30 du matin et un dimanche, ils sont au dodos les méchants des bandes... Et surtout... pas à Alésia...
Opération de com ? Statistiques à faire ? Mon fils et moi quoiqu'il en soit avons contribué à remplir leur tableau. Je ne peux pas dire qu'ils s'en soit montré reconnaissants... ils devraient dire merci à chaque personne qu'ils contrôlent après tout.
Mais tout cela m'a laissé un goût amer. J'ai vécu mon premier contrôle ce jour là. Mon fils en est déjà à son deuxième. Un des ses amis y a droit systématiquement. Leur seul tort ? Ils sont jeunes. S'agît-il d'une consigne ? D'une équation inquiétante : jeune = danger ? Entrons nous dans une impunité policière où le faible doit plus craindre les forces de l'ordre que le délinquants qui reste dans ces zones de non-droit créés par la politique sécuritaire mis en place depuis 2002 ?
Ce genre de contrôle arbitraire ne me donne pas un sentiment de sécurité. C'est même l'inverse. Je pense que les parents expulsés du cinéma par les forces de l'ordre doivent ressentir la même chose ou ces jeunes tabassés devant chez eux et embarqués sans qu'on ne leur ai rien reproché. Tapage nocture = tabassage ? C'est la nouvelle norme ?

Il est peut-être temps de s'interroger sur les missions attribuées aux forces de l'ordre ainsi que sur les moyens qu'on leur donne. Les dix policiers de dimanche auraient par exemple été mieux employés là où la sécurité des riveraines est réellement en jeu. Mais c'est sûrement moins efficace sur un tableau de statistiques...

dimanche 29 novembre 2009

Sommes-nous moins solidaire depuis un an ?


Cette question est un peu de pure réthorique j'avoue et mon côté profondément optimiste veut croire que la réponse est non.

En fait cette interrogation est mue par un simple constat : vendredi se tenait la 2e Nuit Solidaire pour le Logement organisée avec l'aide de plus d'une trentaine d'associations d'aide sociale. Elle se tenait simultanément à Avignon, Lille, Lyon, Marseille, Strasbourg et Toulouse. J'avais un vague souvenir de la 1ere Nuit Solidaire qui s'était tenue en février 2008, Place de la République. J'avais en tête la place emplie de monde pour dénoncer cette situation scandaleuse de personnes obligées de dormir dans la rue faute d'un toit pour les accueillir. J'ai pu depuis vendredi vérifier que mes souvenirs étaient bons : entre 8 et 10.000 personnes étaient présents ce soir là.

Premier constat en arrivant Place de la Bastille : là où je m'attendais à voir une foule immense sur une place aménagée pour cet évènement, je n'ai vu qu'un petit attroupement prêt du Bassin de l'Arsenal avec 5 ou 6 tentes, l'inévitable fumée des merguez, une scène pour les groupes se produisant pour la soirée ainsi que la rythmique ô combien inimitable d'une excellent Batucada. Et bien évidemment, pas le moindre blocage de la circulation.

Je n'avais pas trouvé il est vrai la couverture médiatique à la hauteur de l'enjeu. Je me demande si cette couverture aurait été plus importante si les organisateurs avaient organisé cette nuit en plein hiver, pendant que, comme tous les ans, les journaux égrennent le nombre de sans-abris morts de froid dans la nuit. J'ai peur que la réponse ne soit oui... Si certains journalistes ou plutôt rédacteurs en chef lisent un jour ces lignes je tiens à leur rappeler que malheureusement en moyenne un sans-abri meurt chaque jour... même l'été... Surtout l'été. Loin des caméras.

Couverture médiatique minimale, un espace restreint pour ne pas déranger les fétards se rendant à Paris un vendredi soir (Faudrait pas qu'en plus de nous déranger la bonne conscience, ils nous empêchent d'aller faire la fête tout de même...), je trouve oui à cette aune-là que la Solidarité a du plomb dans l'aile.

Heureusement, les petits, les sans-grades, les anonymes étaient là. Ceux qui donnent sans compter. De leur temps, de leur argent, de leur sueur. Se mêler à ces personnes cette nuit-là c'était prendre une bonne bouffée d'amour, de gentillesse et de naturel. Et la gentillesse était aussi à prendre parmi les sans-abris qui étaient là. La pudeur et la reconnaissance. La dignité aussi. Bien sûr que l'on pouvait y croiser des SDF émêchés renversant leur bière en dansant devant la scène, où les artistes jouaient aussi pour eux. Mais en y réfléchissant, à 200m à peine il y a la rue de la Roquette et je pense que le spectacle de types ivres dans les rues est assez courant... la différence étant que ceux-là rentreront cuver leur vin au chaud, chez eux.

Pour les personnes s'étant rendus à cette nuit, je tiens à vous dire que vous avez cotoyé des sans-abris que vous ne soupçonniez pas. Parce que rien dans leur allure ne le laissait penser. Qu'il faut les avoir rencontré dans le cadre d'une maraude, d'une distribution de nourriture ou d'une aide sociale pour connaitre leur situation. Et souvent il faut leur forcer la main pour qu'ils acceptent cette aide parce qu'encore une fois ils sont dignes.

Je suis allé à cette nuit en me préparant comme une expédition dans une contrée glaciale, chaussure à grosse semelles, polaire, manteau d'hiver, bonnet et gants épais. Le temps était clément mais au bout de quelques heures le froid perce. Il faut bouger sans cesse. Et on perd de minute en minute sa chaleur. La seule façon de la reconstituer est de trouver une source où se réchauffer. La 1ere fut le métro, la suivante mon domicile. Où j'ai pu me calfeutrer comme tout un chacun. Sauf eux.

Comment peut-on sereinement et calmement envisager de reconstruire sa vie, de reprendre un nouveau départ quand on a deux préoccupations vitales en tête : que vais-je manger aujourd'hui et où vais-je dormir cette nuit ?

Il faut les libérer de ces interrogations. Les sortir de cette spirale journalière. Pour qu'ils sortent d'un état de survie pour accéder de nouveau à un sentiment d'avoir une vie destinée à autre chose qu'à emplir des colonnes de statistiques ou des rubriques de faits-divers.

Les associations sont là, les bénévoles aussi mais seuls ils ne font qu'essayer de vider la mer avec une petite cuiller.

L'état mais aussi les collectivités locales doivent régler ces questions et cesser de se renvoyer constamment les responsabilités et les fautes commises à la figure. Pendant ces joutes politiciennes méprisables, des gens souffrent et meurent. En silence.

Nous allons entrer dans une nouvelle période électorale dont l'enjeu est la gouvernance des régions de notre pays. On entend déjà quelques thèmes de campagne comme la sécurité, l'écologie, l'immigration, l'identité nationale... Et si on y ajoutait la précarité ? Elle est une donnée du quotidien et chacun peut la cotoyer et la subir.

La politique est sensée agir sur les maux de la société pour les régler. Y'a-t-il de maux plus grands que la misère humaine ?

Peut-être est-il temps en France d'ouvrir un vrai débat plus que sur l'Identité Nationale, sur la Dignité Humaine ?

jeudi 19 novembre 2009

Roger Kowalski est mort


Roger Kowalski est mort dans le 17e arrondissement de Paris le jour de mon anniversaire.
Il avait mon âge.
Je ne sais rien de lui. Juste que son seul contact était le Samu Social.
Comment sais-je qu'il est mort ? Parce que j'ai assisté ce 18 novembre à la cérémonie organisée par le Collectif des morts de la rue, à la mémoire de ceux qui sont morts cette année.

299 morts à ce jour. Presque un par jour. Moyenne d'âge 47 ans.

À quelle époque faut-il remonter dans l'histoire pour que l'espérance de vie des Français soit de 47 ans ? Le Moyen-âge ? La préhistoire ?

Sur la place du Palais-royal, un cimetière éphémère était installé. En guise de stèle, une feuille de papier au format A4 scotchée sur une couverture posée à terre. Sur cette feuille, le nom, l'âge et la date précise de la mort ainsi que le lieu. Écrites à la main, les circonstances de la mort et à 2 à 3 reprises une photo. Quelques fois un poème.
Mais parfois, souvent, juste une indication : environ 40 ans. Où pire : « un homme » ou « une femme ».

Même dans la mort certains n'auront même pas le droit qu'on pense à eux...

On ne peut pas, on ne peut plus accepter que l'on ne puisse se souvenir d'une personne que sous « un homme de 40 ans mort à Paris le 15 juillet 2009». Parce que les invisibles de la rue meurent plus en dehors de l'hiver... Parce qu'ils sont invisibles justement.

En voyant ces tombes virtuelles, en entendant ensuite l'énumération des 299 noms (plus que le nombre de personnes assistant à cette cérémonie), je fus pris d'une incommensurable tristesse.
Elle ne me quitte pas au moment où j'écris ces lignes.

Je pleure sur eux. Leur vie abîmée, gâchée, qui n'a pu être sauvée malgré tout l'amour et le dévouement déployés par les associations qui les aident et les soutiennent, qu'ils en soient un million de fois remerciés.

Je pleure aussi sur la société qui laisse une partie des ses enfants s'éloigner, ne pas trouver sa place et au final mourir loin d'elle.

Je pleure enfin sur mon impuissance à changer les choses alors que mon engagement politique vise à rendre cette satanée société plus juste et plus humaine !

Mon amie la plus proche fait preuve d'une humanité plus grande que je ne le pourrais jamais en aidant directement les sans-abris avec les Restos du Cœur, en participant aux actions des Enfants de Don Quichotte et en organisant des maraudes elle-même afin d'aider ceux qui sont tombés.
Elle s'attaque, comme les associations, aux effets, aux symptômes de la maladie qui ronge la société. Elle pallie aux carences d'un état qui prône depuis tant d'années un individualisme forcené et applique un désengagement de son rôle de protection.

Il nous faut, nous qui nous targuons de vouloir changer la société, apporter une vraie réponse.

Inventer et apporter une nouvelle vision et la mettre en place.

En collaboration avec les acteurs efficaces sur le terrain, répondre à l'immédiateté des problèmes mais travailler sur le moyen et long terme afin de créer une société juste qui ne laisse personne sur le bas-côté. Une société qui permet à ceux qui tombent de se relever, de reprendre leur souffle et de repartir à leur rythme. Sans jugement. Sans séquelles. Sans rejet.

Si on ne crée pas ça... A quoi bon ?