mardi 20 octobre 2009

Combien vaut ma vie ?

Plus nous avançons dans le temps et plus cette question va prendre une place importante. Partout et de quasi tous bords politique, on nous assène sans espoir d'alternative que nous sommes dans une société marchande où tout à un coût. Donc où tout a un ratio au-delà duquel on est ou pas rentable.

Comment déterminer ce ratio et surtout qui le détermine va devenir une de nos composante intime. Nous nous interrogerons plus simplement sur le sens de notre vie mais aussi sur sa valeur... marchande.

Prenons ce que vaut ma vie. J'ai 42 ans, un fils de 17 ans et je n'ai pas de bien immobilier. Je n'en aurai vraisemblablement jamais à moins de gagner au loto mais il faudrait pour cela que joue. Pas gagné donc. Ou alors je pourrais monter une secte. Idée à creuser.

Statistiquement, je vais entrer prochainement dans la zone de turbulence 45-50 ans. Cette zone assez spécifique à la France où nos chers employeurs, animés d'une vue à court terme, ne voient plus que le coût salarial et non plus la plus-value de personnes possédant plusieurs dizaines d'années d'expériences professionnelles. Le ratio est vite fait. En ne tenant compte que du salaire, un salarié de 50 ans vaut beaucoup trop cher par rapport à un jeune. Mais attention ! Pas trop jeune non plus ! Il faut que le jeune soit formé, ait des années d'expériences derrière lui. Pas trop pour que cela ne soit pas payé à sa juste valeur. Parce que l'autre spécificité française veut maintenant que jusqu'à quasiment 30 ans, la précarité d'emploi soit la règle.

Pendant donc 15 ans, en ayant eu de la chance, on peut considérer que notre vie en vaut la peine au regard des financiers qui sont aux manettes depuis que les politiciens leur ont abandonné la conduite du monde.

Mais il faut aussi ne pas être en mauvaise santé. Sinon on commence à nous culpabiliser avec ce gouffre de la sécu dont nous serions seuls responsables dépensiers que nous sommes. Que ce trou soit creusé par l'état qui ne paye pas ce qu'il doit et qui de plus se sert allègrement dans la caisse n'est jamais abordé (en tout cas, je ne l'ai jamais vu ni entendu aux journaux télévisés). Que les laboratoires pharmaceutiques se servent du système pour placer les mêmes médicaments à des prix de plus en plus prohibitifs n'est pas non plus une des causes apparemment. Non. Les fautifs se sont ces personnes qui vont voir leur médecin pour un rhume sans avoir la décence d'attendre que cela vire à la pneumonie. Quoique cette tendance commence à voir le jour, forfait hospitalier en hausse, franchise médicale et augmentation des tarifs des mutuelles obligent.

Là aussi, lorsque l'on est malade, se pose et se posera de plus en plus la question de savoir si notre vie vaut la peine d'être sauvée au détriment de la rentabilité des établissements hospitaliers. Dans ma grande naïveté, je pensais que nous payions des impôts et autres taxes pour qu'en échange l'état nous assure protection, éducation... et santé. Je ne concevais pas que cela doive être rentable ou rapporter de l'argent. Naïf, je vous dis.

L'éducation de mon fils maintenant. Combien peut-donc valoir sa vie ? Va-t-elle valoir si chère que l'on puisse engager des frais importants pour assurer ses études ? L'éducation laïque et obligatoire, la possibilité pour chacun de progresser sans contrainte de revenu me semble sérieusement entamée. Va-t-il falloir que mon fils s'endette sur 10 ans pour accéder aux mêmes chances que ceux qui sont issus de familles aisées ? Certaines de ces familles il est vrai sont plutôt pour faire entrer leur progéniture dans la vie active le plus vite possible mais n'est pas Dauphin qui veut.

Il me restera néanmoins une solution pour abaisser le coût de ma vie quand viendra le moment de prendre ma retraite : ne pas la prendre. Faire comme ces personnes âgées qui utilisent le CER (Cumul Emploi-Retraite) inventé par notre gouvernement actuel pour permettre à ceux qui le souhaitent de continuer à travailler. Bien évidemment la plupart des retraités qui en « bénéficient » n'ont pas vraiment le choix. Heureusement qu'ils peuvent compter sur toutes ces entreprises qui sont prêtes à utiliser sans complexes cette nouvelle main-d'œuvre bon marché.

Ma vie aura donc un coût acceptable de 30 à 45 ans et de 65 à... la fin ?

Cette vision vous semble outrée ? En êtes-vous sûr ?

Je ne sais qu'un chose quant à moi, c'est que cette société n'est pas un société d'anticipation. C'est la société dans laquelle nous vivons. C'est cette société qu'il va nous falloir changer. Parce que ma vie... a la valeur que je lui accorde et personne n'a le droit de l'estimer à part moi !



1 commentaire:

  1. Pas outrée, non! Juste "calculée"...

    Heureusement, il y a des champs de ma vie qui échappent au calcul, heureusement, j'aime, je jouis, j'admire, je m'émerveille, souvent pour une somme très modique et pourtant avec ferveur et enthousiasme, délectation parfois... avec fougue, excessivement, d'un excès que le CAC 40 ne pourra jamais traduire en courbes boursières...

    Le problème est de savoir si ce qui échappe au calcul peut être goûté quand on n'en a pas les moyens et je ne parle pas de moyens financiers ici pour faire écho à ton article, je parle de moyens temporels, de la liberté d'esprit qui permet de lever le nez du guidon pour sortir de la mine ou de la carrière, ce que nos aînés ont acquis à la force de leur revendication militante.
    Le XIXème siècle, on le croyait achevé! Germinal, enfoui dans les profondeurs de la terre... Les forcats du labeur, des personnages de légende... L'homme moderne avait acquis le privilège, le seul enviable, de pouvoir, après avoir travaillé efficacement à la construction du monde, s'adonner au loisir et à l'activité gratuite de repos, de réflexion, de contemplation, de création.

    Va-t-il falloir renoncer à ces temps précieux qui donnent son prix à la vie et même, qui nous permettent de concevoir (au sens propre) qu'elle a un prix qui n'est pas marchand, ce que ne parviennent plus à distinguer les suicidés du travail, ces nouveaux forçats du labeur... Personne ne peut estimer ma vie mais aurais-je encore la force, la disponibilité d'esprit de pouvoir le faire moi-même quand je me serai épuisé à chercher de quoi la gagner de 15 à 90 ans, si je survis jusque là?

    Non, ce n'est pas de l'anticipation, mais une cause de révolution!

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